Depuis le 1er juin 2022, ce régime s’est ajouté à ceux déjà existants [1] et a assoupli certaines règles du précédent système en place. Dorénavant, la réalisation d’un audit Logement n’est plus nécessaire pour l’obtention des primes relatives aux systèmes de chauffage (installation de pompe à chaleur, poêle ou chaudière biomasse), d’appareils de production d’eau chaude sanitaire (boiler thermodynamique ou chauffe-eau solaire), de ventilation.
Cette décision a été prise en réponse à l’évolution des prix de l’énergie. Ce n’est un secret pour personne, les tensions relatives à la guerre en Ukraine entraînent d’importantes instabilités sur le marché de l’énergie en Europe, ce qui affecte un nombre croissant de ménages. Nous saluons la réponse apportée par le gouvernement, en espérant que de nombreuses personnes en difficultés pourront alléger leur facture énergétique en réalisant des travaux de rénovation énergétique (entre autres). De nouveaux changements viennent d’être annoncés début septembre 2022 avec la disparition de l’obligation de recourir à un audit Logement pour être éligible aux primes relatives aux travaux de rénovation de toiture et aux travaux de moins de 3.000 € HTVA. Ces différentes annonces soulèvent cependant une série d’inquiétudes qu’il nous semble important de partager.
EXIT L’ACCOMPAGNEMENT, BONJOUR LES ERREURS DE PARCOURS
En effet, rappelons-le, l’audit n’est pas simplement une « formalité administrative » permettant de décrocher une aide financière de la Région. Celui-ci consiste en fait en une analyse complète d’un logement existant tant d’un point de vue énergétique (isolation thermique, performance des différents systèmes de chauffage et d’eau chaude sanitaire, …) que non-énergétique (problèmes de salubrité, d’infiltration, de stabilité, …) en y intégrant de possibles modifications de celui-ci (création d’annexe, d’aménagement des combles, …) et en proposant des solutions techniques cohérentes afin de résoudre les problèmes rencontrés et d’améliorer la performance énergétique du bâtiment.
Ainsi, les recommandations pour atteindre ces objectifs sont hiérarchisées en bouquets de travaux visant une cohérence globale à long terme : diminution des besoins en énergie du bâtiment suivie par l’amélioration des performances des systèmes (chauffage et eau chaude sanitaire) puis recours à la production d’énergies renouvelables.
Sans l’intervention et l’expertise technique de l’auditeur, le maître d’ouvrage est livré à lui-même et peut très rapidement s’engouffrer dans des travaux ou solutions techniques incompatibles avec les prochaines étapes de sa rénovation énergétique. Parmi les plus fréquents, citons l’isolation par l’intérieur d’une toiture existante ne disposant pas d’une sous-toiture [2], la pose de nouveaux châssis sans gestion du raccord d’étanchéité à l’air avec les matériaux de finitions ou encore le remplacement d’un appareil producteur de chaleur avant les travaux d’isolation.
Donnons en exemple l’ancien régime de primes (qui date de 2015), lequel a entraîné la disparition temporaire de l’audit énergétique et a ainsi entraîné la mise en œuvre d’isolant dans des toitures qui ne disposaient pas de sous-toiture. Aujourd’hui, cet isolant doit être remplacé, alors que son installation avait été subventionnée !
L’AUDITEUR, INTERMÉDIAIRE ESSENTIEL
Rendre les aides financières plus accessibles en supprimant l’intervenant clé qu’est l’auditeur est-il réellement le coup de main dont ont besoin ces ménages en difficultés ? Le risque majeur est qu’ils pourraient prendre des mauvaises décisions. La communication reste donc un atout maître pour la réussite des travaux entrepris. Supprimer un des seuls acteurs capables d’informer correctement et précisément les candidats rénovateurs n’est peut-être pas la solution à long-terme la plus pertinente.
La multiplication des régimes de primes entraîne également une mauvaise compréhension de ceux-ci auprès des ménages et nécessite, de la part de la Région, une meilleure communication auprès du public. Citons en exemple le montant de la prime de base des nouvelles primes « Toiture sans audit » qui sera de 10 €/m² si les travaux sont réalisés par un entrepreneur tandis que la prime de base [3] correspondante avec audit peut atteindre plus de 70 €/m² !!! Pour les ménages les plus précarisés, ce montant, couplé à la prime « Remplacement de la couverture de toiture » peut s’élever à 450 €/m², soit bien plus que le coût des travaux. De plus, la prime « toiture sans audit » est plafonnée à 6.000 € tandis que la « prime avec audit » est, elle, limitée à 70 % du montant des travaux éligibles. Dans le contexte actuel d’inflation galopante et de diminution de pouvoir d’achat, une communication à ce sujet nous semble indispensable. Or, ces informations ne sont nulle part mentionnées sur le site de la Région.
La majeure partie des communications de la Région vers le grand public (spot radio, interview, …) vise la promotion des primes sans audit. Il n’est que très rarement mentionné que l’audit reste une possibilité, devrait être une étape obligatoire et donne également accès aux primes.
Face à ce flou, le candidat rénovateur se précipite vers la solution la plus plébiscitée et peut se retrouver dans un projet de rénovation énergétique sans expert à ses côtés.
ET L’ESTIMATEUR DANS TOUT ÇA?
Toutefois, dans le dernier régime de primes paru, certaines aides financières sont conditionnées au passage d’un estimateur. Celui-ci constate les travaux à réaliser et fait une estimation du coût des travaux. Il vérifie également que le logement objet de la demande est améliorable et l’éligibilité des travaux. A noter que le délai moyen annoncé pour le passage de l’estimateur est actuellement de 3 mois !
Sa présence est notamment requise pour les travaux de rénovation de remplacement d’une couverture de toiture ou encore d’une charpente. La visite de ce technicien permettra, on l’espère, d’attirer l’attention du maître d’ouvrage sur l’absence d’une sous-toiture et la nécessité d’en prévoir une dans les travaux à venir. On pourrait se réjouir de la présence de cet intervenant s’il était également requis pour les travaux d’isolation de la toiture…ce qui n’est pas le cas. En effet, si une toiture sans sous-toiture doit être isolée sans être totalement rénovée (remplacement de la couverture ou de la charpente), l’estimateur ne passera donc pas, l’auditeur non plus puisque son rôle est rendu optionnel, et l’isolation sera donc mise en œuvre sans sous-toiture au préalable !!!
On se demande donc si ce nouveau régime de primes n’est pas une réponse d’urgence à la situation de crise actuelle, sans vision long-terme (ce qui semble être le « modus operandi» du gouvernement en général). Les futures statistiques sur le remplacement d’isolation subventionnée nous en apprendront davantage même s’il sera probablement trop tard pour faire marche arrière.
Vous avez besoin d’informations en matière de primes et de conseils techniques pour réaliser des économies d’énergie ?
Les Guichets Energie Wallonie sont accessibles du mardi au vendredi 9h – 12h.
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